jeudi 25 janvier 2007

Les grandes marques de cigares: Cuaba

Aujourd'hui, je vous propose la première d'une série sur les marques de cigares cubains. On commence avec Cuaba juste pour rappel du délicieux Divinos que j'ai fumé ce week end.



En observant attentivement les 200 invités de cette magnifique soirée à l’Hôtel Claridge de Londres, on finit par remarquer un petit homme, visiblement mal à l’aise dans son smoking de location. On pourrait presque croire qu’il est là par accident, si ce n’était cette étonnante lueur d’émotion dans son regard.

Car ce 19 novembre 1996 est une soirée exceptionnelle pour Juan Carlos Izquierdo Gonzales, Maître-Rouleur depuis 45 ans à la fabrique Briones Montoto (anciennement Romeo y Julieta).
En effet, Habanos S.A., l’entité de distribution mondiale des cigares cubains, lance une nouvelle marque, ce qui ne s’était pas produit depuis 1968. Mais surtout, et cela seules quelques personnes le savent dans la salle, c’est lui Juan Carlos Izquierdo Gonzales, homme de traditions, qui en en à l’origine.

Le rappel aux traditions, on le retrouve en premier lieu dans le nom de la nouvelle marque : Cuaba, qui nous fait revenir au temps de Christophe Colomb. Les indiens Tainos qui peuplaient Cuba à l’époque roulaient et fumaient déjà des feuilles de tabac en forme de cylindre, qu’ils nommaient dans leur langue Cohiba. Pour l’allumer, ils se servaient d’un arbuste local aux grandes qualités de combustion, qui pousse d’ailleurs toujours sur l’île, et qu’ils appelaient Cuaba.

Mais surtout Cuaba va produire uniquement des cigares de forme pointue aux deux bouts, dite figurado perfecto ou double figurado. Cette forme est celle qui, au XIXème siècle, a répandu le cigare cubain à travers le monde, et en particulier en Europe où ces cigares étaient très appréciés à l’entracte des spectacles. C’est elle également qui, en France où on l’appelle en quenouille, donnera sa forme à la carotte de nos bureaux de tabac.

Le XXème siècle verra le triomphe des cigares cylindriques, dits parajo, à telle enseigne que les figurados vont disparaître à Cuba dès les années 30. On voit certes apparaître des modules pointus à un seul bout, dits figurado torpedo ou obus dont les plus connus sont les Montecristo n°2 et plus récemment le Vegas Robaina Unicos (dont nous parlerons prochainement), mais cela ne suffit pas à notre ami Juan Carlos.

Celui-ci se roule des figurado perfecto pour son usage personnel (sa fuma) afin, dit-il de « ne pas perdre la tradition ». Bien lui en prend, car lorsqu’à l’issue de longues années de ténacité il parvient finalement à convaincre la Fabrique de se lancer dans l’aventure, il est le seul à Cuba capable de rouler ces cigares si particuliers. Notre Torcedor vedette va donc recruter et former spécialement dix jeunes rouleurs qui produisent aujourd’hui les six vitoles de la marque. Quatre sont apparues dès l’origine (Exclusivos, Generosos, Traditionales, Divinos) et deux autres plus tard (Salomones et Diademas). Une septième, Distinguidos, fait partie (avec Montecristo Robusto et Cohiba Pyramides) des trois cigares produits en édition limitée en 1999, en présentés en jarres commémoratives « millenium », aujourd’hui introuvables.

Aucun ne présente une énorme richesse de sensations « gustatives » mais leur équilibre est ailleurs. On ne peut cacher une certaine excitation à l’idée de revivre intérieurement les grandes heures du XIXème siècle, ni le plaisir de fumer une vitole visiblement différente des autres, à la si belle esthétique, un peu excentrique. Il faut également évoquer l’incomparable toucher de ce cigare dont les rondeurs flattent si agréablement la paume de la main.

De par leur forme particulière, les Cuaba proposent un départ plus lent que les obus par exemple, mais également dépourvu d’âcreté. Et ce, logiquement jusqu’à leur point le plus épais à partir duquel, la section se réduisant, on voit apparaître une plus forte concentration des arômes. Il s’agit de cigares de bonne qualité (surtout le Divinos, mon petit préféré) qui ont progressivement gagné en régularité et qui présentent un équilibre élégant qui permettra de les fumer simplement à tout moment de la journée. A ce titre, ils présentent la grande et rare qualité de savoir à la fois plaire au fumeur peu expérimenté et séduire l’amateur plus chevronné.

Un grand merci donc à Juan Carlos Izquierdo Gonzales, qui est décidément bien meilleur rouleur de cigares que pilier de cocktails.

Conformément à la Loi Evin 91-32, je vous rappelle que "Fumer provoque des maladies graves" et que "Fumer tue"




4 commentaires:

Unknown a dit…

Bonsoir,
Je suis ravi que votre blog éclaire enfin ma lanterne à propos des cigares Cuaba. Les Infos sont rares sur ces vitoles.
Ensuite, je vais déguster ce soir mon premier cuaba ; malheureusement, aprés avoir lu des choses en sa défaveur... Je vais essayer de rester objectif.
J'avoue que sa forme me déroute un peu... (J'ai un diademas en cave qui me fait peur à l'idée de l'allumer!)
Voilà, si vous avez des fiches degustation je suis preneur!
Je reviens avec la mienne bientôt!
Cordialement,
Gential

Stephane a dit…

Bonjour,
Certes, votre Diademas évolue plutôt dans un registre équilibré et doux, mais il n'y a pas que Partagas et Bolivar à Cuba, que Diable!
Selon l'humeur du moment, vous avez parfaitement le droit d'avoir envie de ce type de vitole calme, et au demeurant délicieuse.

Pour les fiches de dégustation, il y a là (http://www.cigars-review.org/cigars/Cuaba.htm) mais c'est en anglais.

Amitiés
Stephane

Unknown a dit…

Le distinguidos continue une carrière assez discrète, notamment en Suisse, bien entendu plus en jarre, mais par boîte de 10. C'était du moins le cas jusqu'il y a peu. A suivre.

W

Jean Louis a dit…

Que dire après la lecture de votre blog... Tout simplement bravo !

Juste une précision on fume une cigarette mais on déguste un cigare, enfin je parle des cubains !
A bientôt

Jean Louis

 
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